Cambodge Soir
, Vendredi 22, Samedi 23, Dimanche 24 Juin 2001

En 128 tableaux,
Svay Ken peint une vie, la sienne

Texte : Pierre Gillette
 

Lorsqu'en février 2000 sa femme décède, le peintre Svay Ken éprouve le désir de lui rendre un hommage, de coucher sur le papier l'histoire de sa vie. "Pourquoi ne pas la raconter aussi par des tableaux?", lui suggèrent alors les responsable de Reyum, qui travaillèrent avec lui fin 1998 à la préparation d'une exposition de ses œuvres à Fukuoka au Japon. Ainsi débute une aventure artistique qui aboutit aujourd'hui à une exposition de 128 toiles et à l'édition d'un catalogue dans lequel texte et peintures, dans un récit parallèle, égrennent les menus faits d'une existence humaine traversant un monde où un jour, c'est la joie, un jour, c'est la peine, un jour, c'est la paix, un jour, c'est la guerre...

Chacune des toiles s'apparente à un instantané dans lequel le souci de composition, de représentation formelle, est bousculé par l'expressivité naïve d'un homme qui vous dit de son travail : "je vois les choses alors je les peins et j'ai plaisir à le faire". Tout simplement.

Svay Ken n'a pas appris à peindre. Né en 1933 dans la province de Takéo, c'est dans les années quatre-vingt qu'il saisit pour la première fois un pinceau. Il travaillait alors à l'hôtel Samaki - redevenu aujourd'hui le Royal - et vendait ses œuvres aux touristes de passage. Depuis, il n'a plus cessé de peindre, ouvrant sa propre galerie en 1996, près du Wat Phnom.

"Svay Ken développe à l'intérieur de ce langage pictural naïf, expressif, une poétique extraordinaire", s'enflamme Ly Daravuth, co-directeur de l'Institut des arts et de la culture Reyum. Cette exposition exceptionnelle - au sens où elle combine une réflexion sur l'art et la mémoire - se referme sur un tableau où Svay Ken se recueille devant le portrait de sa femme décédée, affiche une certitude : il n'y pas de création sans émotion.

Vernissage ce vendredi soir à Reyum, rue 178.